5h56 – GOOOOOOOO, quelle ambiance dans la nuit !
Bon, bah pas de secret, avec mon placement en ligne, ça a bouchonné assez vite dans le village.
La course démarre directement par un gros morceau, et pas n’importe lequel : le Galibier par le Lautaret ! Les premières % sont raides, ça joue parfois des coudes inutilement, certains se mettent à bloc ou posent pieds … bref, j’évite de me mettre dans le rouge mais évite aussi de tomber dans le piège du mauvais rythme quand se forment des files de vttistes. Le terrain est humide, de la brume est présente sans température basse : ça ruisselle sur le casque, le visage … Gaffe à la glissade bête.
Quasi 2h plus tard et le portage final, j’arriverais au 1er sommet, le Galibier : franchement, là-haut au lever du soleil, avec la Meije dans le viseur, c’est orgasmique
! Mais faut pas s’éterniser, j’ai réussi à me défaire des bouchons dans la montée, et la descente démarre : je passerai rapidement le concurrent devant moi en grosse galère, par contre le 2ème fera son grincheux. Le grip sera superbe même si sur le bas, je retrouverais l’humidité et la boue liquide.
Tout tourne bien, je rejoins un groupe de même rythme avant de se lancer dans l’ascension au plan Lachat puis aux Rochilles. A ce moment-là, je dois être dans les 60-70, et on entame ensuite la montée à la Ponsonnière. Par ci, par là, je grappillerais 1 place mais globalement ça roule rythmé alors qu’on a déjà 35kms et 2000m de D+…et 4h ! Punaise, ils sont tous affutés
!
La descente de la Ponsonnière arrive, je la connais, c’est 600 de D- avec certains passages piégeux notamment avec l’humidité qui rend les roches glissantes. Mais rien d’ultra technique. Hop, 2 gars hésitent devant la descente, j’enquille directement. Finalement, c’est aussi rythmé dans ce sens, j’en reprendrais que 3 mais une fusée me déboitera sur un passage où un crosseux me gênera.
Ravito, remise des pleins (je fais le raid sans assistance, je suis un vrai moi
), huile sur la chaîne, 2’ chrono et on redécolle pour le Chemin du Roy. Ce single, je le sais, faut pas s’enflammer sinon on y laisse des cartouches et je viens de passer que le 1/3 du raid. En plus on peut se retrouver entre elite/raid 2j/rando, donc ne surtout pas jouer au con car chacun à son objectif.
Un gars me colle « vas-y passe mec» … je le retrouverais un peu plus loin dans le ravin et son vélo encore + bas. Un check que tout va bien avec lui (ouais, j’uis pas un chacal
), et je repars. Un autre gars revient « tiens la fusée de la Ponsonnière », je le laisserais passer aussi : pas de doute, il est agile (et jeune, enfoi.é
) et enquille toutes les épingles en nose-turn mais finalement je ne décroche pas derrière lui.
On revient en direction du Lautaret, sur le bas ; il fait chaud. Je prendrais le temps de me stopper pour enlever les couches et me mettre en mode estival, même si on me doublera … la remontée au Lautaret pique ! Et elle piquera, mais je reviendrai sur des gars dont la jeune fusée. Ah ah ces jeunes
Ravito : ouah, y’a des masses de personnes qui attendent pour l’assistance de coureurs ! dingue, on est limite dans un championnat du monde ! Même stratégie pour ma part : refaire les niveaux, un pipi, ne pas traîner. Le bénévole annonce déjà des premiers abandons…
Direction le tunnel EDF via un sentier bien dégueu dans les alpages, et je me mettrais dans la roue d’un crosseux en Pivot qui roule mon rythme. Sortie du tunnel, la montée du refuge de l’Alpe, raidar glissant, 54ème km : ça y est, ceux qui sont partie trop fort commencent à couler une bielle. La jeune fusée qui avait zappé le ravito, se collera à moi avec le gars en Pivot. Je sais que derrière, il y a une belle descente : dès le début, je mettrais du rythme pour ne pas être gêné dans la partie épinglue du single : le crosseux pète, mais le jeune doué ne me lâche pas. La descente finira par un single en flanc en flow, genre T2 … je me remets dans mon rythme et joue du terrain pour prendre de la vitesse. Le jeune doué saute. Je ne le reverrais plus.
S’annonce ensuite la remontée à Villar d’Arêne, puis Ventelon. Cette partie est usante, je ne l’aime pas, des raidars sur route puis sur piste et des sentiers ludiques où il faut relancer. Dans la première partie roulante, je me ferais déposer par 2 purs crosseux : semi-rigides, pas de sac, gros braquet. Coup au mental
On arrive à la bifurque du raid 1j/2j, physiquement on est dans le dur 70kms/3100 de d+, mais je passe avec de la marge les barrières horaires, et je suis dans les temps que je me suis fixé. Forza !
Au ravito, je revois les 2 crosseux « j’abandonne ». Ah ouais ça faisait les beaux sur le bitume
. Pour ma part, pas moyen, j’ai la volonté même si le mental passe par pleins d’états.
On m’annonce 44ème, oh le coup de boost !!!! Il semblerait que pas mal de vttistes aient mis le cligno à la bifurque …
C’est à ce moment que le vrai raid démarre pour moi, entre 3000 et 4000 de D+ je sais gérer. Là faut aller chercher beaucoup plus, l'inconnu.
Il reste 2 gros morceaux et les prochaines BH, elles, vont devenir de + en + tendues ! Il fait 27°, et commence le portage/poussage pour la Buffe. Je le ferais avec 2 gars, à distance les uns des autres. Ne pas décrocher … y’a plus grand monde. Looongue partie … tout au mental. Cette partie est, en terme de paysage, juste magnifique pour moi ; je rêve d’y venir en automne.
Plateau du Rif Tort. J’avais prévu de ne pas me cramer ici, le single donne envie d’envoyer, le cadre est wahou … mais faut en garder sous la pédale. Les quelques roulages en pump-track aident ;)
Ravito, on ne change pas, 2’-3’ chrono ! Descente de la Besse en vue, là j’ai prévu de rythmer tout en récupérant. On n’est plus trop nombreux mais je reprendrais 2 gars, dont un xc clairement à l’aise et propre. Il se mettra dans ma roue. La fin de la descente, sur les freins, tirera sur les avant-bras et les mains.
Dernière bosse en vue, le GR de Besse : 8kms/700 de D+
. Un calvaire, on a déjà plus de 4000 ! d’autant plus qu’on voit les concurrents devant et derrière …
Là, pas de secret, je me mets mon développement et je me fixe de ne quasiment plu y toucher en maintenant une cadence élevée (j’ai pas une grosse puissance). C’est purement mécanique, le regard est dans le vide, les jambes en ont marre, le mental s’effiloche, le temps file. Il reste une BH au sommet, et la marge fond comme neige au soleil. Je reprendrai quand même 2 gars, avec des vélos qui doivent peser la moitié du mien
, eux aussi, regard dans le vide.
Je m’arrêterai au dernier ravito pour eau et amandes. Punaise 3 gars déboulent et filent sans arrêt « ils sortent d’où eux ??? 3 places de perdues ! ».
Le final au Souchet se fera en poussage/pédalage au mieux pour quasi tout le monde ; je vois un groupe et me fixe de les reprendre, chose faite … zut, un groupe qui a abandonné à l’avant-dernière BH.
A la bifurque du plateau d’Emparis et de ses lacs, un gars revient sur moi « il est quelle heure ? »
Et là le doute « on n’a pas passé la dernière BH ? » … « non » … « mais il ne nous reste que 20 min »
L’électrochoc ! pas moyen de se faire rembarrer si près du but. Je ne saurais l’expliquer mais ça m’a mis un putain de coup de pied au fion (dont je ne préciserais pas l’état après plus de 11h de selle) ! J’ai appuyé, appuyé jusqu’au lac noir. Je vois les bénévoles qui pointent « c’est la BH ???? » … « ah non, c’est pas nous ».
Cramé pour cramé, je me dis « t’en fous d’où elle est la BH, tu mets tout jusqu’à l’arche d’arrivée et tu stoppes pas tant que t’y es pas ». Là ça sera full power
Démarre la longue descente entrecoupée de courtes remontées assassines, du single, des passages défoncées, du kif …. et pas 1 randonneur, la Meije pour moi tout seul. Je pédale, je pédale.
Arrive à la descente du Chazelet, caillouteuse et piégeuse, je relâche rien, mes bras pleurent ! Je ferais la remontée au village en rythme, je sais qu’il ne reste que la descente plus technique de la chapelle.
Même combat, je relance de partout, je tape dedans, c’est poussiéreux, je perds 2 fois l’avant mais relance quand même.
Quasi 900 de D- d’une traite depuis Emparis … 5 vttistes repris.
Reste 2 kms de plat, je lâche rien, un vttiste doublé juste avant s’accroche … je le ferai sauter dans le portage final des escaliers.
Je passe l’Arche, ça applaudit, je suis arrivé au bout ! Objectif atteint, finisher !!! J’arrive exténué mais punaise, j’en ai encore sous les pieds. Le coup de pied à Emparis m’a fait chercher des réserves inespérées. Au final, il s’avère que j’avais passé la dernière BH avec 30’ d’avance. Sensation de plénitude et d’accomplissement perso.
Les stats : 118 kms - 5 275m de D+ - 12h15 - 38ème (9ème de ma classe d’âge). Au-delà de mes espoirs !
344 partants, 76 finishers, ça a sabré, la sélection est + hard que pour rentrer à Polytechnique
Devant, du lourd (pros en xc marathon) mais aussi d’autres vttistes lambdas comme moi. Je retrouve mes potes qui faisaient le raid 2 jours ... je suis arrivé avant eux. Ils bacheront le dimanche.
Là aujourd’hui, y'a pas à dire : Une vraie aventure de VDM (y’a plus technique, y’a plus roulant), dans un cadre grandiose. Une orga au top. Une réussite en tous points.
Un défi perso. - un défi réussi.
NB : mon pneu avant a tenu !
Loin des c*ns, proches des cimes. Moi l'avenir, je préfère celui d'avant !